par Adara » 21 Janvier 2010, 18:42
C'est amusant, on a en fait une vision très différente du cinéma dans une première mesure (entre l'entreprise/capital et l'oeuvre d'art) et même de l'art : l'art c'est pour la thune ou l'art c'est pour l'art.
Ces deux pôles reposent sur deux visions du monde qui sont trop différentes pour se concilier (en gros discussion qui ne mène à rien).
Personnellement je ne pense pas que l'art soit destiné à faire de l'argent. Il peut en faire mais ce n'est pas son objectif. Penser que l'art fait nécessairement de l'argent est un non sens. Déjà de grands artistes étaient pauvres comme job de leur vivant, ensuite d'autres grands artistes sont passés aux oubliettes pendant plusieurs siècles avant de redevenirs immenses (Bach par exemple). En revanche dire que l'art c'est mal dès qu'il fait de l'argent c'est aussi un non sens.
La vraie question est qu'est-ce que l'art ? qu'est-ce qui définit une oeuvre d'art, l'acte de créer? Il y en a beaucoup mais la plus intéressante que je trouve est celle de Monsieur Proust: l'oeuvre d'art est un canal qui te permet de voir le monde par l'intermédiaire de l'esprit de quelqu'un d'autre. Je ne saurais jamais comment smon ou benz voient le monde parce que je ne serais jamais dans leur tête. S'ils créent une oeuvre d'art, j'aurais en tout cas un aperçu de quelque chose qui se trouve dans leur tête.
Concernant le cinéma, on se trouve à cheval entre l'art et le profit. En effet, comme tous les spectacles vivants (théatre, musique etc) le cinéma est un projet ponctuel. En gros si tu te loupes t'as perdu de l'argent. On entre donc dans une logique capitalistique. Le souci est que ça peut avoir une conséquence sur le contenu de l'oeuvre qui, pour certains dont moi, la fait sortir dans une large mesure du domaine de l'art. Or, contrairement à quelques uns d'entre vous, je ne vais pas généralement au cinéma pour me "distraire", mais pour voir quelque chose de beau, saisissant, interpelant, exaltant et potentiellement distrayant. Pour note il m'arrive d'aller au ciné pour me distraire, ce que j'ai fait avec avatar, parce que je ne m'attendais pas non plus à un chef d'oeuvre.
Ce que je pense, c'est que lorsque la logique capitalistique prend trop le pas sur la logique artistique, on se trouve face à un produit issu du marketing, soit en fait un produit construit pour plaire au spectateur. C'est très exactement l'inverse de ce qu'est l'oeuvre d'art : un canal qui me permet de voir le monde à travers les yeux de quelqu'un d'autre. L'un me montre ce que je veux voir, l'autre me montre ce que je n'aurais peut être jamais imaginé voir. L'un me surprend, l'autre me donne un susucre.
Je préfère mille fois the eternal sunshine of the spotless mind à avatar. Je suis sorti bouleversé du premier et avec plein la gueule du second mais croyez moi, celui dont je me souviendrais jusqu'à la fin de mes jours c'est le Gondry.
Je comprend bien que pour une part d'entre vous ce que je dis là ne correspond pas à votre vision du ciné ou à ce que vous y cherchez. J'attend de l'art, vous attendez du divertissement. L'un peut aller avec l'autre mais l'un peut aussi aller sans l'autre. Au cas présent, avatar n'est pas une oeuvre d'art. Il ne correspond donc pas à mon attente sur cet aspect là, mais peut correspondre très largement à l'attente de quelqu'un qui souhaite se divertir.
Pour remettre les choses au clair, je ne me suis pas ennuyé. J'ai pas passé un mauvais moment mais il ne faut pas mélanger la chèvre et le choux : avatar est un divertissement et c'est tout.
Ceci dit en quoi le fait d'être un simple divertissement est-il mal ? En rien. Au pire il n'a pas plus à ceux qui en attendaient plus. Est-ce si grave ?